Traduction d’un article pour  l’Institut Cuyamungue

About Felicitas D. Goodman and the work of Cuyamungue Institute

À propos de Felicitas D. Goodman et du travail de l’Institut Cuyamungue

Les découvertes clés de Felicitas D. Goodman, anthropologue et fondatrice de l’Institut Cuyamungue

Felicitas Goodman a fait quelques découvertes dans sa carrière anthropologique qui forment la propriété intellectuelle fondamentale de l’Institut Cuyamungue (situé au Nouveau Mexique aux US).

1 : Les expériences mystiques sont réalisables grâce à un changement physiologique normal et naturel, facilement accessible à tous ceux qui ont un système nerveux sain. Ces états sont notre droit de naissance, indépendants de tout système ou dogme.

2 : Ce que les pratiques spirituelles de toutes les sociétés autochtones antérieures et actuelles ont en commun est une liste courte comprenant quelques étapes essentielles – donc une recette universelle, accessible à tous.

3 : A partir de 40.000 ans d’art archaïque, elle a décodé des artefacts sélectionnés comme contenant des « instructions rituelles ».

Qu’est-ce qui a conduit Goodman à ces idées novatrices ?

 
En tant que linguiste qui parlait et écrivait huit langues, Goodman s’est jointe à une étude révolutionnaire lorsque son mentor, l’anthropologue culturelle Erika Bourguignon, l’a embauchée pour traduire des centaines d’ethnographies recueillies dans le cadre d’une enquête de l’Institut National de la Santé Mentale sur les cultures autochtones du monde entier. La conclusion — que plus de 95 % des cultures tenaient les pratiques visionnaires comme sacrées, saines et essentielles à la « colle » qui les tenait ensemble — a contribué à légitimer les études sur l’élévation de la conscience dans les années 1960. Alors que Goodman traduisait, elle a compilé une liste de ce que toutes ces pratiques avaient en commun dans le cadre de ses propres recherches. En dépouillant la superposition culturelle, une série d’étapes simples, essentielles et familières a émergé : consacrer un espace sacré. Attendez-vous à de bons résultats. Préparez-vous. Appelez les esprits avec une offrande, car lorsque nous faisons appel à la participation d’un ordre élevé, nous montrons une mesure de respect et de réciprocité. Un battement rapide, rythmique, monotone, fourni par le chant, la psalmodie, le tambour, ou le hochet, est l’ « entrainement sonique » qui active le changement à travers le seuil dans la réalité non-ordinaire. Quand cela cesse, le corps revient naturellement à son état de veille ordinaire. Avec un geste de remerciement, le rituel est terminé.

L’intuition de Goodman, selon laquelle entrer dans des états visionnaires n’est pas basé sur un système de croyance, mais sur un changement physiologique, a fait un autre bond en avant avec le rapport d’un collègue selon lequel le fait de s’asseoir dans une posture de yoga pendant cinq minutes entraîne des changements physiologiques mesurables. Ce fut son moment Eureka : tenir une posture spécifique peut affecter la physiologie? Comme sa spécialité était les plus anciennes sociétés autochtones et les sociétés de chasseurs-cueilleurs, elle est allée chercher les postures qui étaient significatives pour ces cultures, telles qu’enregistrées dans ces artefacts anciens. Des indices dans l’œuvre d’art, tels que « cet air indubitable du regard intérieur » sont devenus évidents dans sa recherche de postures assises et debout qu’elle a décodées comme « instruction rituelle » — un total de 60 postures, trouvées encore et encore dans des cultures largement séparées par la géographie et l’époque. À cette époque, elle enseignait l’anthropologie à l’Université Denison dans l’Ohio, et ses étudiants étaient exigeants, « vous dites qu’il y a un moyen de réaliser des états visionnaires sans drogues ? Essayons! »

Avec une petite subvention, elle a poursuivi son expérience, menant le rituel tout en demandant aux volontaires de se tenir dans la posture qu’elle montrait pendant la durée des 15 minutes de l’entrainement ou conduite sonore. Avec cela, Goodman a trouvé ce qu’elle avait cherché – vraiment un « voyage de transe extatique », entièrement dans la capacité propre du corps et sans drogue ni substance végétale. De tels voyages ont longtemps été considérés comme le royaume des mystiques seulement, mais Goodman a constaté que cela était réalisable par toute personne ayant un système nerveux sain et les codes d’accès corrects.

En 1983, elle a été invitée à tester ses théories dans les laboratoires de Johann Kugler à l’Université de Munich. Ils ont trouvé que ce changement physiologique naturel et facile inclus quelques résultats peu communs : la tension artérielle a chuté (dans des limites sûres), pourtant le pouls a augmenté (aux niveaux habituellement atteints en courant très vite). Les tests EEG ont montré que le flux continu d’ondes Bêta (celles d’état ordinaire et éveillé) est rejoint simultanément par des ondes Thêta (celles du rêve de sommeil profond). Les analyses sanguines ont révélé une diminution du cortisol, l’hormone du stress, et une poussée d’endorphines bêta, les hormones de bien-être. Elle a ressenti le terme académique de « transe extatique » tiré de l’étymologie grecque Ekstasis, comme « être ou se tenir en dehors de soi, un déplacement vers ailleurs », qui décrit bien le voyage expérientiel vers un autre royaume et son retour, ainsi que le sentiment d’exaltation et de bonheur en résultant. Le livre de Goodman, « Where the Spirits Ride the Wind » raconte l’histoire de ses découvertes et de ses recherches dans son intégralité.

Laura Lee et Paul Robear poursuivent la recherche.

« Alors, quel est ce changement physiologique qui donne naissance à cet état visionnaire? » avons-nous demandé au Dr Geert Meyer, qui venait de passer la semaine avec nous au CI à tester cela. Professeur agrégé en neurologie à l’Université Philipps de Marburg/Allemagne, spécialiste de l’esprit et du cerveau dans le sommeil et le rêve, il a été impressionné par notre travail, et a offert cette explication:

« C’est extraordinaire que nos ancêtres si loin en arrière ont développé ce rituel simple pour activer certains des centres du cerveau responsables de rêver, alors que nous sommes encore éveillés. Extraordinaire! Habituellement, ces deux centres ne se parlent pas, car l’un est éteint tandis que l’autre est activé. Donc, ce que nous avons ici est un état élargi de conscience, avec à la fois les centres de veille et de rêve actifs en train de se parler en même temps. C’est une sorte de « rêve éveillé ». Ce n’est pas un rêve lucide, mais c’est coupé du même tissu. Et de constater que les humains avaient des techniques pour activer cela il y a si longtemps est extraordinaire! »

Nous appelons cela une « transe » parce que nous avons perdu le langage pour désigner un quelconque  état se situant en dehors de notre pensée rationnelle préférée. Il ne s’agit pas d’un état diminué, mais d’un état plus pleinement engagé, avec plus d’activité cérébrale le soutenant – on est pleinement éveillé et conscient, tout en s’engageant simultanément dans un voyage intérieur de dimensions surprenantes et vivides.

La Science aujourd’hui confirme une petite partie de ce que nos ancêtres savaient depuis longtemps.

Les dernières recherches révèlent que la tenue de postures spécifiques entraîne des changements physiologiques. Dans le livre d’Amy Cuddy « Presence: Bringing Your Boldest Self to Your Biggest Challenges »,  elle cite des tests qui ont révélé une augmentation de 19% de testostérone et 25% de diminution du cortisol en se tenant simplement pendant deux minutes dans la pose « Wonder Woman » avec les mains sur les hanches, le menton incliné vers le haut, les pieds plantés à part. L’idée que les postures du corps affectent notre physiologie a touché la population générale. Cuddy’s TED talk, « Empowering Through Body Language » est le deuxième plus populaire avec 46 millions de vues.

Bien que cette posture (du Serpent à plumes) soit une sur les centaines que nous utilisons dans notre travail, il est également intéressant de noter que cette pose particulière est inhabituelle en ce qu’elle est souvent adoptée spontanément – vous pouvez reconnaître cela comme la pose de la « mère qui réaffirme sa position ». Pour la plupart des postures, nous pourrions nous demander pourquoi quelqu’un pourrait s’asseoir ou se tenir ainsi, aussi simple qu’elles soient. Nous trouvons la plupart de nos postures assez précises et cohérentes à travers les nombreuses cultures qui les ont représentées.

ST, cycle de Vishvamata 2022, Provence

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